L’activité économique de l’ordinateur fait quelque peu oublier l’universalité logique d’un instrument qui peut se prêter á l’examen de toute réalité, pourvu, bien sur, qu’on lui en donne les éléments. Très tôt, des artistes de toutes disciplines : compositeurs, peintres, architectes, graphistes, etc., s’y sont intéressés. Que chaque art ait ses propres lois, on n’en doute guère, mais que l’oeuvre d"art, si personnalisée á travers chaque artiste, si apparemment insaisissable dans sa genèse, puisse être objet d’étude scientifique á l’aide d’un ordinateur, voire donner lieu á l’élargissement ou á une évolution de la notion de créativité, attachée traditionnellement á des critères subjectifs, voilá qui peut surprendre.
Toujours est-il que l’activité artistique en tant que processus de création rapproche, par l’ordinateur-médium, l’artiste et l’homme de science. Sans doute le couple art science invite t il de lui même á un débat général, á caractère plus ou moins philosophique. Il n’entre pas dans nos intentions de prêter le flanc á un tel débat. En cette matière, comme en d’autres, trop souvent les positions sont acquises d¿s le départ. Que vaut l’oeuvre d’art produit de la mytho-mécanique, pense le détracteur ! Qui peut créer les formes les plus raisonnables et l’objet d’art objectivement beau, sinon l’ordinateur, libéré d’émotions futiles, de conduites obscures, se réjouira le partisan ? Ces positions extrêmes tiennent elles compte de la réalité ? Notre intention n’est pas de confirmer où d’infirmer tel ou tel point de vue mais d’informer.
Dans le cadre des relations que la Compagnie entretient avec divers groupes de recherche á travers le monde, nous avons demandé á Monsieur Camarero, sous directeur de I’Institut de Calcul de l’Université de Madrid de nous faire part des explorations entreprises par un groupe de mathématiciens et de peintres espagnols que réunit le goût de la rigueur scientifique, de l’oeuvre d’art et de l’ordinateur.
“Quel rôle l’ordinateur peut il jouer dans l’activité créatrice des hommes ? En dépit de ses succès et de ses conséquences passionnantes, notamment la conception des ordinateurs, l’algèbre de Boole avec son cortége de théorèmes possibles, formellement vrais si elle permet de constituer un ensemble de lois logiques, ne livre pas pour autant, du point de vue scientifique, les recettes de la création, qui continuent d’échapper á la formalisation. Quelle est donc, au sein du problème général de la création et principalement la création scientifique, la situation particulière de la création artistique ?
D’abord, une constatation. La création artistique diffère de la première, non parce que sa nature répond á des règles non scientifiques, mais parce que jusqu’á présent, l’intervention de procédés systématiques dans la conception d’0euvres plastiques, n’a guère été pratiquée. Par lá nous ne voulons pas dire que le peintre, par exemple, n’utilise pas certaines règles de composition chromatique, mais que la fa on dont il les formule ou les utilise est enrobée d’imagination, d’intuition et d’émotion.
L’apparition de l’ordinateur, la possibilité qu’il offre d’engendrer des formes graphiques, a l’aide d’un traceur de courbe ou d’un écran cathodique : dispositif de sortie de l’information largement utilisé dans l’industrie, a provoqué chez certains artistes un vif intérêt. L’oeuvre graphique d’un ordinateur, le produit de sa créativité, il sera dit plus loin comment, peut elle porter le nom d’oeuvre d’art ? Question stimulante pour l’esprit, qui élargie, pose la question plus fondamentale : qu’est ce que l’art ? Si l’art est susceptible d’une approche plus scientifique, ce á quoi vise les recherches de ces artistes, si les résultats obtenus par l’emploi de l’ordinateur sont considérés comme positifs, n’est ce pas que l’art, auparavant, était réglé par des lois inconnues ? D’où aujourd’hui encore des définitions des phénomènes artistiques, vagues, inexactes, comme pouvaient l’être celles de la physique avant Galilée.
Mais quelles sortes d’oeuvres I’ordinateur engendre t-il ? Dabord ce qu’il est convenu d’appeler le « computer art ». Entrent dans cette catégorie certaines courbes ou familles de courbes mathématiques, obtenues au moyen d’un traceur de courbes ou d’un écran cathodique dont la souplesse d’utilisation se prête á la plasticité des formes á rechercher. Nous considérons ce genre d’oeuvres comme des paysages du monde compliqué des mathématiques parmi lesquels l’artiste, suivant la vieille tradition paysagiste, sélectionne ceux qui lui semblent présenter le plus grand intérêt. Le fait d’attribuer une valeur esthétique aux figures géométriques n’est pas nouveau, mais I’ordinateur agrandit considérablement le champ d’observation ; les courbes qu’i trace sont beaucoup plus précises. Symétrie ou autres propriétés géométriques, parce qu’elles sont formulées mathématiquement, fournissent des renseignements très clairs, tant pour la sélection des oeuvres que pour leur création proprement dite.
Mathématiques et art abstrait.
La collection de cartes postales éditées par le Palais de la Découverte de Paris montre une grande variété de formes. Ce procédé de composition graphique á l’aide d’un ordinateur a eu un grand nombre d’adeptes : Petor Milojevic, Jack Citron, M. S. Mason, Messinger, K. Strand, J. Szabo, A. R. Forrest, H. W. Franke, Arrechea Sempere, pour n’en citer que quelques uns.
La création automatique de formes plastiques n’implique pas qu’on élimine totalement les fantaisies capricieuses du hasard. Bien au contraire. Etant donné les difficultés de trouver des critères esthétiques pour juger de la valeur d’une oeuvre, l’artiste peut laisser l’ordinateur chercher lui même des figures ou des formes imprévues plus vivantes ou, moins froides que celles obtenues par les seules équations. Les éléments fortuits confèrent á l’oeuvre variété et surprise. Frieder Nake, un des principaux représentants de cette tendance de recherche, estime qu’il faut programmer I’ordinateur pour lui faire réaliser une catégorie entière de dessins contenant des formes sans doute déterminées, mais exprimées dans toutes leurs variations. Cette façon de concevoir la création artistique est assez analogue à
A gauche « Klee N’ 2 » de F. Nake.
celle qui consiste á suivre un thème, musical par exemple, dans toutes ses possibilités, guidé seulement par l’intuition. Ici le concept l’intuition signifie le choix de possibilités prises dans un répertoire donné. L’ordinateur simule l’intuition en sélectionnant, automatiquement, des nombres au hasard, dont il donne la traduction graphique.
Les premiers á faire ce genre d’expérience furent G. Nees et de Erlange qui exposa publiquement ses résultats en 1965. Il s’agit essentiellement de prendre au hasard des points dans un rectangle puis de les unir par des segments d’une longueur également prise au hasard (la pointe du traceur de courbe, se déplace verticalement et horizontalement). Toujours dans ce champ de l’aléatoire, bien que cherchant certaines irrégularités statistiques, se situe l’oeuvre de Noll dont la verticale horizontale a des ressemblances avec l’oeuvre de Nees, mais aussi avec celle de Mondrian « composition avec lignes ».
L’art figuratif á la portée de l’ordinateur.
L’art figuratif reste t il en dehors des possibilités de l’ordinateur ? Les travaux de Csuri, qui font appel aux transformations mathématiques et au hasard, intègrent aussi le dessin : Guerre aléatoire, Du chaos á Fordre ’ Mouches dans la transformation de Miller. Selon les même critères, Leslie Mezei a construit ses oeuvres : Transformation, 0 Canada. L. D. Harman et K. C. Knowlon, au lieu de lignes, utilisent des taches. Leurs couvres sont élaborées á partir de photographies, explorées comme en télévision par points dont la brillance est ensuite analysée et représentée par des signes graphiques de différents tons de noir.
D’autres groupes á travers le monde, effectuent des recherches analogues ou cumulen ces diverses tendances. Au Japon avec Fujino, Hasegawa, Kakizaki, Komura Niwa. Au Brésil le Groupe CEAC, notamment les peintres Berni et Deira. En France où le Développement Scientifique de la Compagnie IBM étudie les conditions et les modalités générales de la créativité par ordinateur.
Tels sont quelques uns des travaux ou groupes de recherche auxquels on se réfère souvent. Leur évocation très incomplète, donne cependant un aperçu des grandes lignes de recherche. Les oeuvres réalisées jusqu’á présent sont des exemples timides de ce que pourrait faire un ordinateur. Il convient aujourd’hui d’entreprendre une étude plus poussée de ce qu’est l’oeuvre d’art pour que les réalisations á venir puissent vraiment communiquer un message plastique. L’oeuvre d’art n’est elle pas un moyen de communication entre l’artiste et le spectateur ? Mieux, un moyen d’intercommunication. Le souci d’établir les conditions de la création d’oeuvres d’art par l’ordinateur est lié aux problèmes généraux de la communication et notamment á la théorie de I’information, qui peut donner lieu á une interprétation esthétique.
A droite Vertical Horizontal de A.M. Noll. Blonde élancée de L. Mezei.
Ci dessous Transformation de A. Berni.
Les travaux d’esthétique mathématique d’un Birkhoff, avaient déjá donné une certaine esthétique quantitative. Puis ceux de Max Bense. Moles analyse aujourd’hui, en détail, le processus de la communication selon la théorie de l’information. L’important á ses yeux, dans l’oeuvre d’art, est que l’artiste veuille communiquer avec son public et accepte donc comme valeur principale l’efficacité de la communication. En choisissant comme son problème, celui de la communication, l’artiste doit tenir compte des lois de celle ci. C’est d’après elle qu’il faut comprendre les oeuvres de R. Gunzenhauser et de J. M. de la Prada á Madrid. De la même façon devra t il s’intéresser aux études de la perception visuelle, en développement elles aussi, notamment avec la théorie des signes et des super signes de Moles, qui sont essentielles pour comprendre et établir les critères de valeur de l’oeuvre d’art.
Peinture, langage et communication.
Au centre de calcul de l’Université de Madrid, il nous a paru intéressant d’étudier la production d’oeuvres artistiques par ordinateur, en nous appuyant sur les recherches linguistiques qui se développent de plus en plus. Dans l’oeuvre d’art, on trouve en effet tous les éléments de base d’une langue : morphologie, syntaxe, sémantique. Les analogies entre les messages écrits ou oraux et les messages plastiques ou le message musical, sont certaines. Mais elles ne sont pas á ce jour suffisamment explicites pour que l’on puisse bâtir des modèles de linguistique esthétique.
Les différences que les modèles plastiques présentent par rapport aux modèles linguistiques découlent de la double dimension de l’oeuvre picturale et des caractéristiques particulières de la perception visuelle. Le répertoire de la sémantique qui donne un sens á l’oeuvre d’art est sans doute constitué d’émotions, de valeurs psychologiques qui échappent á une logique externe, mais il présente cependant une régularité permettant une certaine systématisation.
Parole de quatre modules de M. Barbadillo.
Entre autres, le contexte social et culturel où a lieu la communication artistique, est un facteur susceptible d’être analysé et dans une certaine mesure intégrée au modèle.
De toute façon, on peut dorénavant envisager de définir des grammaires génératives plastiques.
Encore faut il concevoir ces grammaires ? Nous avons commencé á Madrid, l’analyse statistique et structurale d’oeuvres de Mondrian dont la simplicité constitue une très bonne base de travail. Des peintres, Barbadillo, Quejido, contribuent activement á l’effort de « modélisation ».
Une équipe de mathématiciens, d’architectes et de peintres, ayant comme préoccupation commune d’utiliser l’ordinateur pour créer des oeuvres plastiques ou architecturales, travaillent depuis plusieurs années en étroite collaboration. Les résultats de leurs travaux ont donné lieu á une exposition. Les oeuvres exposées n’étaient pas toutes de « main d’ordinateur ». Toutes seront cependant exploitées par lui dans un proche avenir.
Pourquoi cette référence au modèle linguistique ? L’oeuvre d’art modulée, c’est á-dire, ayant pour élément simple un module, présente la simplicité de l’énumération de l’alphabet. Ici, le symbole graphique remplace les lettres ou encore, ces modules de travail sont, pourrait on dire, des mots avec lesquels l’artiste va construire sa composition. Un tableau est constitué par le groupement ordonné de ces mots ou modules-symboles. Ainsi, le peintre Barbadillo, travailla d’abord avec un alphabet formé de symboles obtenus á partir de l’un d’entre eux, par rotation, symétrie, complémentarité. Bientôt, il élargissait l’alphabet initial ; avec quatre symboles fondamentaux, il construisit des phrases formant un carré puis, en groupant quatre ou plus de ces phrases, un tableau. Comme les modules s’enchaînent avec continuité, l’assemblage de plusieurs d’entre eux donne lieu á une unité formelle de plus grande taille.
Quel est le róle de l’artiste...
Malgré les limites qu’impose á l’invention de la forme, l’adoption d’un module, la liberté de choix entre les combinaisons possibles est pratiquement illimitée. De nombreuses expériences ont montré qu’en fait, bien que le choix soit subjectif, le nombre des possibilités satisfaisantes est réduit. Pour limiter le nombre des combinaisons, il suffit d’établir quelques règles relatives á la continuité et á la liaison esthétique des formes faites de modules combinés.
Ces règles restrictives sont établies intuitivement par l’artiste ou obtenues plus objectivement par le recours aux éléments de la théorie de l’information : variété, ordre, complexité, ou á d’autres, donnant un sens aux formes particulières et á leurs structures.
Toujours dans cette voie de la « modulation » travaillent des peintres comme Soledad Sevilla, et d’une certaine façon, Gomez Perales, qui utilisent des modules rectangulaires dont les dimensions sont formées par série des nombres de Fibonacci, Briones utilise directement l’écran d’affichage de l’ordinateur, pour choisir son alphabet. L’écran, lui, permet de rechercher de nouveaux modules. Une fois l’alphabet choisi, il compose des oeuvres combinant des critères subjectifs et structuraux assez analogues á ceux de Barbadíllo. Quejido, au moyen d’un traceur de courbes, fait déplacer ses formes modulaires sur des trames bien définies, en suivant des règles systématiques engendrant des séquences dont le mouvement peut être filmé. La transformation des formes géométriques dans un espace plan est aisément programmable.
Yturralde s’intéresse plus particulièrement aux problèmes de la perception avec la création de figures impossibles. Bon nombre de ces figures bien connues dans les traités de psychologie de la perception, ont été développées de façon systématique grâce á l’utilisation de l’ordinateur. Les figures traitées sont surtout á trois dimensions. On donne á l’ordinateur quelques critères simples qu’iI utilise pour créer des relations impossibles. L’artiste choisit ensuite les figures les plus suggestives et achève son oeuvre en y introduisant la couleur.
Parallèlement á ces recherches pratiques, un effort de pensée théorique est entrepris, toujours á Madrid, afin de justifier les méthodes utilisées, notamment par J. M. de la Prada sur les critères de sélection des oeuvres picturales, et par J. Seguí de la Riva qui ajoute aux schémas de la théorie de l’information les significations symboliques obtenues á partir des tests de Rorschach. Plus récente et tout aussi passionnante est la tentative de construction d’une grammaire picturale générative d’oeuvres d’art proposée par I. Gomez de Liaño. Toutes les expériences ou recherches ont lieu au centre de calcul de l’Université de Madrid sur des ordinateurs IBM.
... et celui de I’ordinateur.
Quels résultats obtiendrons nous dans cet effort de systématisation de la création artistique ? Il est selon nous prématuré de se prononcer á ce sujet. L’ordinateur est il capable de sélectionner des thèmes significatifs, de produire de nouvelles formes d’art, d’établir des critères qualitatifs ? Certains pensent que non. Nous sommes plus optimistes. L’ordinateur n’est sans doute qu’un outil, mais un outil extraordinaire et qui oblige, nécessité capitale, á élaborer une méthodologie.
Nous faisons notre par ailleurs, l’idée de Moles, de l’unité de l’art et de la science dans les processus créatifs. Il n’existe pas de différences de base entre la création artistique et la création scientifique dans leurs phases initiales. Nous estimons aussi qu’un grand nombre de procédés systématiques, postérieurs á cette phase, sont de même nature.
Dans les méthodes traditionnelles de création artistique, il existe de toute façon, un grand nombre de procédés mécaniques, d’habitudes, qui entravent la liberté de création au point de faire abandonner á l’artiste le fil conducteur qu’il avait entrevu au départ. C’est sur ce point précis que I’ordinateur devient un instrument précieux, un auxiliaire, car nous ne prétendons pas réduire l’activité intellectuelle ou artistique à une pensée mécanique. Mais en découvrirant ce qui, dans la création, présente un caractère systématique, nous pensons libérer d"autant la pensée purement créatrice des servitudes de l’habitude ou de la répétition auxquelles n’échappent ni l’homme de science, ni l’artiste”.
Le pouvoir de création passera t il de l’homme á l’ordinateur ? Les propos de Monsieur Camarero auront permis au lecteur de dissiper lui même l’ambiguïté d’une telle question. La création d’œuvres d’art picturales ou musicales, par exemple, est possible parce qu’elle n’est pas radicalement différente de la création humaine. Les malentendus naissent on le sait, bien souvent, d’une absence de définition des termes employés. Le terme de création apparaît en fait, assez mal approprié. Il évoque d’emblée une création á partir de rien alors qu’en fait, l’homme créateur, artiste ou homme de science, arrange, transpose, restructure des éléments, imaginaires ou empruntés á la réalité. « La création humaine peut en fait se définir comme une nouvelle combinaison, inattendue, imprévisible, d’éléments préexistants ; l’ordinateur peut imiter cette forme de création en certaines de ses étapes. Son travail n’en demeure pas moins programmé par l’homme. Même le dosage éventuel d’intervention aléatoire résulte d’une détermination humaine. Dans les arts, qu’il s’agisse du temps et de l’espace. des sons et des mots, il est clair que l’ordinateur peut combiner des éléments, rapprocher des structures, produire, par multiplication de combinaison, cet effet de kaléidoscope qui parfois provoque l’admiration, tant la complexité d’une oeuvre, d’un tableau ou d’une composition musicale, est souvent á l’origine de l’émotion qu’elle inspire ». Ces lignes, nous les empruntons á Pierre Demarne, auteur d’une étude de synthèse présentant les résultats provisoires es des recherches entreprises par le Développement scientifique de la Compagnie IBM France, sur les conditions générales de la créativité par ordinateur.
Créativité artificielle, mais qui apporte un supplément d’inspiration aux artistes, peintres, musiciens, architectes, sculpteurs á la recherche de formes nouvelles. L’ordinateur n’est donc pas pour l’homme un rival en puissance, mais son complément. L’ordinateur apporte á I’homme en situation de création, artiste ou homme de science, une puissance d’innovation encore peu explorée, riche de promesses.